Construit en 1892, l’ouvrage d’art fut détruit en 1956 afin de répondre à l’intensification du trafic routier. Aussi, les dauphins furent en partie fondus et quelques-uns furent sauvegardés, comme les deux pièces que nous avons le plaisir de présenter ici.
Rares témoins historiques d’une œuvre de Gustave Eiffel, étant de surcroît de belles sculptures de superbe qualité, ces pièces peuvent dorénavant être adaptées en fontaines ou orner un jardin d’agrément.
Né à Dijon le 15 décembre 1832, le jeune Gustave est admis à l’École Centrale en 1852, et s’oriente dans la métallurgie en 1856. C’est en travaillant pour Charles Nepveu que le jeune ingénieur réalise ses premiers projets de constructions de ponts, ce qui lui permet dès l’âge de 25 ans d’avoir la charge de l’immense Pont de Bordeaux. A la suite de ce succès capital, il réalise plusieurs ponts dans le Sud-Ouest.
Prodige du milieu du XIXe siècle, Eiffel se met à son compte à Levallois-Perret, à la tête d’un atelier qui conçoit toutes les pièces destinées à être assemblées sur les chantiers. Entre 1870 et 1880, le monde entier fait appel à G. Eiffel et Cie, notamment pour l’ossature de la Statue de la Liberté à New-York (1882), la gare de Pest en Hongrie, mais aussi à Java, en Bolivie ou en Algérie. Sa carrière culmine en 1889 avec la réalisation du monument le plus haut de l’époque, la Tour Eiffel.
Le pont de Grenoble et ses dauphins est donc une de ses premières constructions réalisées après la Tour Eiffel, en 1892. Quoique Gustave Eiffel soit immensément reconnu pour la réalisation de la Dame de Fer, les dauphins du pont de Grenoble sont donc très représentatifs de sa carrière.
La ville de Grenoble s’élargit considérablement au XIXe siècle, passant de 10 000 à 74 000 habitants. Vers 1880, l’enceinte de la ville s’est élargie ce qui demande la construction d’un pont reliant les deux berges de l’Isère.
Vers 1890, après le succès de la Tour Eiffel, la ville de Grenoble fait appel au grand ingénieur Eiffel pour la construction de son pont, et les travaux commencent en 1892. Tenant sur deux piles dans l’Isère, le pont de la Porte de France, appelé également pont de l’Esplanade ou pont de la Bastille, comporte trois travées et les gardes corps sont ornés de dauphins en fonte.
Devenu trop étroit au XXe siècle pour les besoins de circulation, le pont est détruit en 1956, et remplacé par une construction de Pelnard-Considere et Cie. Les 68 dauphins du pont Eiffel furent en partie fondus, mais quelques uns furent préservés par les villes de la région et par des particuliers.
Les dauphins, symboles de la Province du Dauphiné
Les artistes de la Renaissance ont puisé dans ces représentations antiques, si bien que le dauphin mythologique a marqué les esprits dans des œuvres extraordinaires, comme la Fontaine du Triton que sculpta Gian Lorenzo Bernini pour le pape Urbain VIII, en 1643.
Un dessin de Jean Le Pautre fixe bien les traits que nous retrouvons dans ces dauphins de fonte : le corps couvert d’écailles, les yeux cernés de volutes concentriques, une nageoire dorsale et deux nageoires de chaque côté de la tête.
Ainsi, les dauphins chimériques décorent la ville de Grenoble déjà en 1825, avec la Fontaine Lavalette fondue par Crozatier. Eiffel préfère pour son pont de 1892 une forme plus harmonieuse, permettant d’adoucir les angles d’assemblage du garde-corps avec la poutre. Répétés tout le long du pont, ces dauphins étaient discrets de loin tout en offrant une agréable décoration de plus près.
La paire de dauphins que nous présentons revêt donc une importance historique, étant de rares vestiges d’une œuvre détruite de Gustave Eiffel. Authentiques ornements du garde-corps de l’ancien pont de Grenoble, d’une qualité exceptionnelle propre à une commande publique, ils portent avec eux la mémoire des progrès incroyables, notamment technologiques, qui furent réalisés grâce à la société G. Eiffel et Cie.
Je voudrais juste signaler une erreur. L’usine Richard-Pontvert (Paraboot) se situe à IZEAUX dans l’Isère et non à Sceaux en Ile de France.
J’habite à Izeaux, j’ai travaillé dans cette entreprise et je vois les dauphins très régulièrement.
Merci pour l’information ! C’est corrigé.
bonjour
je ne connaissais pas cette histoire qui mérite effectivement d’être racontée; mais question qui n’est pas abordée : qui a fondu ces dauphins ? Quelle fonderie d’art ? Il n’y a pas de signature apparente, pas de documentation ?
Bonjour et merci pour votre message. Effectivement, aucune marque de fonderie n’est visible ce qui est relativement surprenant. Pour le moment, nous n’avons trouvé aucune documentation à ce sujet. Les recherches se poursuivent donc 😉 si vous trouvez un jour des informations, nous serions ravis d’en savoir un peu plus.
C est mon père Georges Cumin qui a réalisé le Pont de la Bastille en 1956 et à distribué les dauphins
Il a donné 4 dauphins à Richard Ponvert en échange de 2 paires de chaussures de ski en cuir
Une pour ma mère et une pour lui!!!
Bonjour,
Je suis conservateur restaurateur de sculpture et je travaille actuellement sur deux dauphins du pont de la porte de France (et accessoirement sur trois autres conservés chez un particulier). Le problème est qu’ils ont tous une teinte différente. avez vous des informations sur leur teinte originale (les photos d’archive sont malheureusement en noir et blanc). Il y a également deux modèles de dauphins. Ceux que vous présentez ornaient la rambarde. L’autre modèle est un peu plus long mais je ne sais pas ou il était installé (extrémités du pont ?). Avez vous une idée ?
Nous avons aussi deux dauphins à Colombe Isère qui sont actuellement devant la nouvelle mairie après avoir été posés devant l’ancienne mairie
Pour notre commune, l’ancien maire Joseph Bardin les avait récupérés à Grenoble ou dit la légende (vraie ou pas) ils étaient destinés à la destruction