Cheminée de style Louis XVI en marbre Arabescato à colonnes en carquois d’après le modèle du Château de Fontainebleau dessiné par Pierre-Marie Rousseau en 1786

Marbre Arabescato, bronze doré, fonte de fer.

Hauteur : 110 cm ; Largeur: 194.5 cm ; Profondeur : 40 cm

XIXème siècle.

Réalisée d’après la cheminée du Boudoir de la Reine au Château de Fontainebleau
dessinée par Pierre-Marie Rousseau en 1786.

Cette somptueuse cheminée de style Louis XVI en marbre Arabescato subtilement veiné et richement ornée de bronze doré a été réalisée au XIXème siècle. Avec des dimensions importantes, elle fut réalisée d’après le modèle de cheminée installée au Château de Fontainebleau dans le Boudoir d’argent de Marie-Antoinette dessiné par l’architecte Pierre-Marie Rousseau en 1786 et dont il s’agit du premier travail d’importance pour la cour.
Vue du Boudoir d’Argent, Château de Fontainebleau.

Sur le bandeau s’entrelacent une couronne de fleurs et un arc sur lequel courent des branches de lierre, plante grimpante associée à la vitalité dans l’Antiquité. Le bronze de ces motifs est très élaboré, notamment au niveau des tiges de lierre d’une très grande finesse. La frise de feuilles d’acanthe sur la partie supérieure et celle, plus fine, de fleurs en cloche sur la partie inférieure du bandeau, toutes deux réalisées en bronze doré, appuient les lignes droites de la cheminée.

Cheminée du Boudoir d’Argent, Château de Fontainebleau.

Selon Yves Carlier dans Le Boudoir de Marie-Antoinette à Fontainebleau, il est vraisemblable que le sculpteur Philippe-Laurent Roland (1746-1816), qui est le créateur des figures de plâtre représentant des Muses et situées en dessus-de-porte, soit également intervenu dans le modèle des bronzes de la cheminée et des espagnolettes des fenêtres, éléments ensuite réalisés par le bronzier Claude-Jean Pitoin. Jacques-François Dropsy fut quant à lui le marbrier de la cheminée d’origine.

Notre cheminée est la réplique exacte de celle de Fontainebleau, bien qu’elle comporte des éléments hérités de son siècle : elle est dotée de côtés galbés, ajouts typiques du XIXe siècle, ornés de couronnes de roses, motif conçu toutefois dans un esprit tout à fait XVIIIème siècle : à la manière de rosettes naturalistes, elles sont suspendues par un ruban. Dans le même esprit, l’intérieur en fonte de notre modèle est orné de branches de feuilles et de nœuds qui s’entrelacent.

Les jambages, dont les cannelures sont délicatement fuselées, prennent la forme de carquois de flèches aux plumes en bronze doré. Une frise de branches de lauriers nouées et sur lesquelles trône une petite tête de lion orne ces carquois. Ce motif de carquois, caractéristique du style Louis XVI, se retrouve, dans le boudoir, sur les pieds des deux fauteuils, du tabouret de pied, du secrétaire à cylindre en nacre de perle incrusté de Jean-Henri Riesener ou encore sur les crochets des volets.

Claude-Jean Pitoin, platines des crochets de volet du Boudoir de la Reine, Château de Fontainebleau.

Rodolphe Pfnor, Relevé d’une espagnolette du
Boudoir de la Reine, dessin.
Ce boudoir dispose ainsi d’une harmonie ornementale parfaite : la couleur or argenté des panneaux décoratifs se retrouve sur le secrétaire de nacre ainsi que sur l’écran de cheminée, aujourd’hui conservé au Metropolitan Museum of Art et réalisé par Georges Jacob, également auteur des sièges. Certains des motifs, tels que les carquois, ou encore les perles et rubans, se font quant à eux écho. En effet, le motif de l’arc et de la couronne de fleurs en bronze doré présent sur le bandeau de cette cheminée ornent aussi la traverse supérieure des sièges et de l’écran. La cheminée d’origine s’insère ainsi parfaitement dans ce décor chatoyant et aux multiples reflets conçu à la manière d’une œuvre d’art total.

Vue du Boudoir d’Argent, Château de Fontainebleau.


Georges Jacob, écran de cheminée, ca. 1786, hêtre sculpté, doré et argenté, brocart de soie,
Metropolitan Museum of Art, NYC.

Construit à travers les âges, le Château de Fontainebleau fut la demeure des souverains français de François Ier à Napoléon III. Surnommé la « maison des siècles » par Napoléon Ier, il est ainsi le témoignage de plusieurs styles et phases historiques. Si les premières traces d’une construction remontent au XIIème siècle, le château se compose surtout d’éléments des styles Renaissance et classique. Celui qui est considéré comme l’emblème royal de la Renaissance française, François Ier, fait en effet du Château l’une de ses demeures principales et y entreprend plusieurs travaux de modernisation. Henri IV à son tour agrandit le Château, travaux poursuivis, sans modifications majeures, par Louis XIII.
Château de Fontainebleau.

Au XVIIIème siècle, Fontainebleau, devancé par le Château de Versailles, symbole de la monarchie, n’en reste pas moins un lieu de chasse et de nombreuses réceptions mondaines mais aussi le lieu de quelques rencontres politiques et diplomatiques. Notamment, le Château voit la signature de trois traités dont deux durant le règne de Louis XVI : le Traité de Fontainebleau signé entre l’Autriche et les Pays-Bas en 1785 et le traité de commerce à la fin de la guerre d’Indépendance américaine entre la France et l’Angleterre en 1786. C’est également l’année du dernier voyage de l’Ancien Régime à Fontainebleau durant lequel les souverains ont l’occasion de découvrir les nouveaux aménagements commandés l’automne passé, dont les deux cabinets de retrait pour la Reine. L’un, au décor exotique, est le Boudoir Turc, l’autre le Boudoir de la Reine, ou Boudoir d’argent, au décor des plus raffinés, où se trouve le modèle original de notre cheminée. Nommé ainsi d’après les fonds d’argent encadrés d’or sur lesquels sont peints, parmi des fleurs et des arabesques, des grotesques peintes par Michel-Hubert Bourgois et Jacques-Louis-François Touzé, le Boudoir d’argent se situe entre les chambres de la Reine et du Roi. Créé sous la direction de l’architecte Pierre-Marie Rousseau dans le goût de la Reine, le Boudoir possède un décor antiquisant dont Marie-Antoinette était férue et dont notre cheminée et son modèle d’origine portent quelques traces.

Jules-Marc-Antoine Frappaz, « Le Boudoir de Marie-Antoinette », 1876, huile sur toile, Musée national du Château de Fontainebleau.

Le Château est vidé de son mobilier après la Révolution française, avec en conséquence sa dispersion dès 1796. Napoléon Ier, qui y passera les derniers jours de son règne, redonne une seconde vie au château à partir de 1804 : il le fait réaménager et y donne des spectacles d’opéra et de théâtre. Par la suite, Louis XVIII et Charles X y feront de rares séjours, tandis que Louis-Philippe sera à l’origine des premiers travaux de restauration. Du XIXème siècle datent ainsi les derniers travaux effectués au Château, qui dès 1862, est inscrit au titre des monuments historiques. Sous le Second Empire, le château devient un des lieux de villégiature de la cour avec Saint-Cloud, Compiègne et Biarritz : l’impératrice Eugénie se prendra d’ailleurs d’affection pour le Boudoir Turc. Aux débuts de la Troisième République, le Château accueille quelques réceptions mondaines et politiques et, en de rares occasions, certains Présidents. C’est de cette période que date le tableau de Jules-Marc-Antoine Frappaz conservé au Musée national du château de Fontainebleau et sur lequel est représentée notre cheminée entourée du mobilier installé durant le XIXème siècle.

Notre cheminée au superbe décor, réplique du modèle d’origine, est ainsi tant le témoignage des fastes du XVIIIème siècle et de l’histoire du château de Fontainebleau, que du goût du siècle suivant pour la reprise des modèles phares avec parfois quelques variations.

 

BIBLIOGRAPHIE :
CARLIER, Yves, Le Boudoir de Marie-Antoinette à Fontainebleau, Somogy éditions d’art, Paris, 2006.